samedi, juin 19, 2010



Paul Gauthier & Les Maîtres - Mon père dans une discothèque (RCA Gala CGPS 373, 1969)

Ce dimanche 21 juin, c'est la Fête des Pères. Vous n'alliez tout de même pas oublier votre géniteur, votre paternel, votre daddy-ho!?! Je profiterai donc de cette rare occasion pour célébrer brièvement les joies de la paternité et dédierai le prochain extrait à mon père, René, celui qui a su déteindre efficacement sur ma personnalité depuis 34 ans et avec qui je partage plusieurs passions pour notre passé culturel. Pour toi, papa...

A priori, le nom de Paul Gauthier n'éveillera probablement pas de souvenirs tangibles. Dans les années 60, sa carrière évoluait déjà dans l'ombre de son frère, le célèbre chansonnier Claude Gauthier. L'homme emprunterait néanmoins des avenues similaires à ce dernier. Comédien avant tout, il a joué dans plusieurs longs métrages dont Entre la mer et l'eau douce (avec son frère, Geneviève Bujold et Robert Charlebois) en 1967, puis Red, Deux Femmes en or, Les Mâles et -mon préféré- Parlez-nous d'amour en 1976.



À la fin des années 60, Paul Gauthier caressait toutefois un projet différent: un hommage poétique aux mères et aux pères de ce monde. Deux étiquettes de disque différentes (RCA et Trans-Canada) approuvèrent le concept et commandèrent au comédien deux albums différents: Hommage à une mère (Trans-Canada) ainsi que Pour toi, mon père (RCA). Les deux albums offrent plusieurs témoignages poétisés, dans le style spoken word avec un accompagnement minimal à l'orgue. Certaiement pas de quoi fouetter un chat... Sur l'un comme sur l'autre, le débit de Gauthier est lent, le propos plutôt lourd et l'hommage, somme toutes, mièvre et redondant. Il faudrait toutefois patienter jusqu'à la publication de son hommage paternel pour retrouver le comédien cette fois-ci exalté et joyeusement naïf, prêt à dynamiser son approche. Et comment! En explorant toutes les facettes de la relation père-fils, Gauthier imagine une scène improbable et donnant lieu à tous les excès: Mon père dans une discothèque.

Le Prof Maboul fête son 4e anniversaire (Télé Radio Monde, ocotobre 1970).

En empruntant à outrance un slang hippie qui ne semble même plus de son âge, Gauthier personnifie un fils qui convainc son père de vivre aux rythmes de sa jeunesse et de sa marginalité. Une soirée au bar le Prof Maboul (propriété de Pierre Marcotte et du chanteur Joël Denis) se transforme en un véritable cours en accéléré à propos de l'éphémère génération psychédélique! On discute d'amour, de drogues (beaucoup de drogues), de liberté et d'autres utopies. Totalement dans l'air du temps! Père et fils se rapprochent à mesure que la scène évolue, bien que Gauthier ne soit l'unique (et éreintant) monologuiste de ce titre. L'accompagnement musical catalyse cette rencontre. Il y a de l'électricité dans l'air, littéralement, et pour cause: le groupe Les Maîtres offre deux performances époustoufflantes et inédites en guise de décor sonore!

Les Maîtres, vers 1969.

Avant de se métamorphoser en Morse Code Transmission, Les Maîtres pressèrent trois simples, tous sur RCA. Le groupe était composé de Michel Vallée, Jocelyn Julien, Christian simard et Raymond Roy. Ces deux derniers n'étaient pas de nouveaux venus puisqu'ils avaient aussi auparavant participé au groupe Les Pieds Nicklés. Sur disques, l'ensemble propose une pop-rock énergique et plutôt originale. Sur scène, on imagine que c'était beaucoup plus heavy, moins commercial, et c'est ce son qui fut retenu pour électrifier le discours de Gauthier. Leurs deux titres inédits à leur catalogue officiel sur 45 tours sont chantés en anglais et s'intitulent Everything can be free et Baby Yours. Une seule écoute vous convaincra et vous aussi, comme Gauthier, vous ne pourrez vous empêcher d'y aller de quelques «Wwoowowowowwww». De la dynamite! Rien ne nous prépare à une telle décharge et l'auditeur dévoué verra sa patience récompensée lorsqu'il atteindra la face B de cet album. J'en profite pour remercier les amis Marc Lambert et Satan Bélanger qui m'ont gentiment aiguillé vers cette obscurité, un album en apparence banal qui cache cette exquise perle rare. Bonne écoute! Mon père, toi t'es zoom...


lundi, juin 14, 2010


Journal des Vedettes, 5 septembre 1970.

Jean Fortier - La Dernière entrevue

J'ai récemment découvert ce qui pourrait bien être la dernière et saisissante entrevue qu'accordait le chanteur sur son lit d'hôpital en septembre 1970. Toujours aussi candide et lucide, Fortier se révèle amaigri et partiellement paralysé sur tout le côté gauche de son corps. Le diagnostic demeurait flou (trop de protéines dans le liquide rachydien ). Tragiquement et à son insu, un foudroyant cancer contrecarait déjà toute forme de rémission; les jours étaient comptés... À la première lecture, le fan en moi resta de glace, stoïc devant un tel témoignage. L'entrevue prit alors un détour inattendu. Soucieux d'élucider le mystère de sa soudaine maladie, Fortier trace ainsi un lien avec la consommation récente d'un joint de marijuana différent :

Un soir j'étais chez des gens que je connaissais peu et ils m'ont invité à fumer de la marijuana. Je n'avais pas fumé depuis un an. Je ne sais ce que contenanit cette marijuana, mais j'ai fait un «mauvais voyage». J'en ai d'ailleurs parlé à mes médecins. Jamais je n'avais réagi de cette façon. J'ai été obligé de m'enfermer dans une chambre, chez ces personnes, avec mon épouse. Sans elle, je ne sais ce que je serais devenu. Il est possible qu'à un moment, une obsession ait cause une crise psychique... je ne puis le dire avec certitude, mais c'est bien possible. Dorénavant, bien fini pour moi ces voyages, j'ai eu le mien. Je vous dis cela pour que les jeunes qui liront ce papier pensent avant d'agir. Je ne suis pas un croulant, du moins je le pense, et peut-être qu'ils me croieront. Qu'ils s'imaginent un instant la paralysie sur un lit d'hôpital. Qu'ils regardent mes photos, ils comprendront...

[...] Vivant, aurait-il pu promouvoir et vivre cet album sur scène assez pour le hisser dans les palmarès? J'en reste convaincu. Malgré la maladie, Fortier gardait un moral exemplaire et planifiait déjà son prochain projet: une comédie musicale intitulée
Zoé & Pamplemousse. Il s'agissait d'une satyre de la génération flower-fruit-drugs pour laquelle il entrevoyait déjà la participation d'Yvon Deschamps et Françoise Lemieux dans les rôles principaux. Le projet ne verrait malheureusement jamais le jour et il n'en tient qu'à vous d'imaginer comment cet étonnant spectacle aurait pu se manifester...

J'ai récemment pris la peine d'actualiser de nombreux articles de plusieurs extraits de la presse mondaine Québécoise des années 60. En plus des topos sur Jean Fortier (les simples et l'album éponyme), vous retrouverez dès maintenant quelques images supplémentaires accompagnant les articles à propos de La Belle Amanchure ainsi que de l'album Aimons-nous les uns les autres de Michel Conte. Bonne lecture!

dimanche, juin 13, 2010

Télé Radio Monde, décembre 1969.

Tournées et Nightlife Montréalais (1966-1970)


On a souvent de la difficulté à décrire le nightlife montréalais marginal de la fin des années 60, à en extraire toute la modernité et l'effervescence qui en émanait. La belle époque des boîtes à chanson prenait discrètement fin et celle des cabarets trépassait. Tout aussi «éphémères», les bars psychédéliques, libertins et ou carrément avant-garde défileraient parallèlement à l'effervescence des modes et mentalités. Aussitôt in que c'était out... Le foissonnant ouvrage de Chantal Dumas, Montréal Show Chaud, revisite efficacement le rythme effreiné de l'éveil culturel Québécois d'une perspective montréalaise, une identité nationale aux travers des manifestations des Bozos, Garou & Mouffe, Claude Léveillée, Pauline Julien et toute une trollée d'artistes influents. Riche en photos: Recommandé! Dumas néglige pourtant de souligner les manifestations yéyé ou psychédéliques (pensez aux Love-In des Sinners). L'héritage des bars underground, par exemple, demeure négligeable, mais est pourtant intrinsèque à «la vie d'orchestre»...

Aux cours des prochains mois, je vous proposerai plusieurs extraits numérisés de la presse à potins Québécoise de la fin des années 60. Photo Journal, Echos-Vedettes, Photo-Vedettes, Nouvelles Illustrées, Photo-Police, Journal des Vedettes, Le Nouveau Samedi et autres Télé Radio Monde seront ainsi scrutés à la loupe. Pour les complétistes, notez que la date et le titre de chaque publication est inscrit dans le nom de chaque image. Place aux éphémères!


Suparchipelargo de Charlebois et son esthétisme bédéèsque psychédélique (Echos Vedettes, octobre 1969).

The Ladybirds est un groupe américain de cinq musiciennes qui avait tout un gimmick: les membres jouaient sur scène, seins nus. Elles n'enregistrèrent qu'un seul, excellent et rare 45 tours northern soul vers 1966, (Handsome Boy / Yes I Know , disponible sur iTunes) mais les filles se produisaient déjà dès le début de la décennie et continueraient jusqu'à la prochaine. Elles feraient une brève apparition dans le film de sexploitation de 1968 The Wild, Wild World of Jayne Mansfield et seraient aussi bouquées, la même année, au célèbre bar Chez Paree de Montréal.






Le nightlife montréalais, du Boulevard Saint-Michel à Notre-Dame (Photo-Police; décembre 1969)


Deux mondes se cottoient au Forum à l'occasion de la Saint-Jean-Baptiste (Nouvelles Illustrées, juin 1969).

Si le groupe montréalais Life vous est inconnu, je ne saurais trop vous recommander l'article de l'ultime blog Garage Hangover (leurs sélections Québécoises valent le détour) à propos de leur simples de 1969 pour l'étiquette Polydor. Je vous proposerai bientôt un survol de leur unique album; en attendant, écoutez leur premier simple.







Starovan (commandité par la radio de CJMS) et Musicorama étaient de folles entreprises où quelques dizaines d'artistes partageaient la scène le temps d'une brève mais intense tournée en province ou dans la région montréalaise. Un feu roulant de performances alors que les groupes et chanteurs alternaient leurs courtes prestations (20 minutes environ), le temps de jouer leur plus récent simple, avant de céder la place à un autre, puis un autre... Véritables panoramas des vedettes montantes de la pop Québécoise, la formule éreintante avait tout de même un sacré ratio (1 spectacle, 10 à 20 artistes différents) et permettait de saisir en une soirée LA pop du moment. Tous les éléments y étaient réunis! Aujourd'hui, on préfère les festivals aux interminables tournées, regroupant des dizaines d'artistes dans un programme condensé de quelques jours (Osheaga, Francofolies). Cette diffusion, pour la plupart du temps montréalocentriste, ne pourrait-elle pas reprendre la route, question que tout le Québec en profite? Les récents spectacles ittinérants Tous les garçons et Toutes les filles en sont de bons exemples. Il y avait aussi cette imposante tournée de nombreux groupes métal Québécois qu'il faudrait louanger, mais... j'ai oublié le nom.



Starovan de novembre et décembre 1969 (Photos-Vedettes; Échos-Vedettes)


Starovan d'octobre 1968 [g] et novembre 1967 [d] (Le Nouveau Samedi; Journal des Vedettes)

La vague déferlante des groupes yéyé puis psychédéliques entraina une surabondance de prospects entre 1964 et 1969. Qui deviendrait le it-thing des palmarès de la semaine prochaine? Quel nouveau venu nous ferait oublier tous les autres? Voici quelques prétendants sans lendemain qui n'existèrent que le temps d'une photo discrètement cadrée dans les journaux à potins. Saurez-vous nous en apprendre plus à leur sujet? Écrivez-nous!


Les Gladstone [g], avec un jeune Pierre Flynn (Photos-Vedettes, octobre 1970) et les Satanicks [d] (Télé Journal, juin 1969)



Si Les Smacks ne furent probablement qu'un feu de paille, qu'en est-il des GAP qui avaient un contrat avec les Disques Jupiter?
Et que dire de cette mystérieuse Roseline? Quelqu'un la connait?



Rare press clips of Montreal's nightlife between 1966 and 1970, scanned in high definition, taken from numerous gossip newspapers from my personal collection, with more to come in the next months. Check out the lineups on those Starovan tours! If you know anything about these last four bands (Gladstones, The GAP, Les Smacks, Les Satanicks), write to us.