dimanche, février 22, 2009




Walter Boudreau, Raôul Duguay & 333 musiciens invités

Dans le cadre de sa programmation 2009, le Festival Montréal / Nouvelle Musique (MNM) proposait le 22 février dernier un rare concert. Sous le titre Chantez avec Raôul Duguay, ce happening des plus réussis réunissait à l'Église St-Jean-Baptiste de Montréal ces deux anciens membres de l'Infonie pour l'interprétation de "In C", une oeuvre de 1964 de Terry Riley. Cette pièce avait d'ailleurs été interprétée et enregistrée en septembre 1970 par l'Infonie pour son second album, Mantra ( ou Vol. 33)


Ce concert en compagnie de Louise-Andrée Baril (piano), Annabelle Renzo (harpe), Evan Green (sitar), l'ancien Infoniaque et membre passé du Quatuor du (Nouveau) Jazz libre du Québec Guy Thouin (tablas), Julien Grégoire & Robert Slapcoff (percussions) et Jean-Willy Kunz (orgue) était enrichi d'une orchestration extraordinaire réunissant 333 chanteurs et musiciens invités. Chapeau au organisateurs d'avoir réussi à rassembler plus de 24 choeurs locaux, ensembles vocaux et groupes d'harmonie de Montréal: l'église était pleine à craquer (ou presque)! Des chanteurs éparpillés un peu partout, des musiciens sous les jubés; Boudreau et son ensemble sur la scène faisaient face à Duguay, juché sur une une petite plateforme érigée au centre de l'allée centrale, sous la voute principale. À mesure que la performance évoluait, Boudreau faisait l'aller-retour dans l'allée principale en brandissant une ou plusieurs pancarte(s) indiquant le segment à jouer. Une si grande foule rassemblée dans le seule but d'entretenir une singulière vibration, cette suite nébuleuse de 53 osmoses qu'on en vient immédiatement à qualifier de «mantra»: voilà un rare événement auquel il faisait bon participer. Il y avait des enfants subjugués partout, des grand-mères en transe, des choristes perplexes mais enjoués et au moins une spectatrice dansante: partout où vous posiez les yeux, quelqu'un s'émerveillait... La performance débuta à 3h33 précises (numérologie si chère à Boudreault) et dura près d'une heure. Je ne suis pas ésotérique, mais je me contenterai de dire ceci: en sortant du concert, j'étais encore plus convaincu des qualités thérapeutiques -autant moralement que physiquement- que génèrent certains types de musique.

Une première réinterprétation de l'oeuvre avait eu lieu en 1997 et fut publiée en 2000 sur les disques ATMA (ACD 2 2251). Depuis, l'interprétation originale de 1970 (Mantra) fut incluse à la réédition officielle des premières oeuvres de Terry Riley, Reed Streams, en guise de matériel boni. En suivant ces hyperliens, vous pourrez lire l'histoire complète de cette oeuvre et comprendre les motivations de Boudreau et de ses anciens comparses Infoniaques.





jeudi, février 19, 2009

Salade de Fruits - Salade de Fruits (1983; Bofort BF-3001)

** J'ai été surpris de recevoir plusieurs courriels me demandant de remettre en ligne ce titre proposé dans les premiers jours de ce blog! À la demande générale, le revoici. Régalez-vous! **

Salade de Fruits c'est la réponse Québécoise aux albums de reprises populaires pour enfants (retenons les Mini-Pops par exemple). L'album, enregistré aux Studios Saint-Charles de Longueuil, vous dresse un copieux menu de reprises francophones (L'Oeil du Tigre, [Larmes de] Métal, Pied de Poule, Da Da Da, etc.), cette fois-ci sans voix prépubères.

En guise de trou normand, la face B de l'album vous réserve un hymne éponyme original. Comme thème, vous ne trouverez plus intègre: les paroles se résument au titre sussuré inlassablement sur un air pop-rock new wave. Le chanteur, les lèvres soudées à son micro, vous hypnotisera de son timbre cochon à souhait. Celle-là -soyez avertis!- ne vous quittera pas de sitôt; vous l'entonnerez encore la semaine prochaine...

Vincent Deslauriers, tu ornais la pochette vêtu de tes commandites chez la Boutique Jacob et Steeve's Music. Que deviens-tu?





Jean Fortier - Première Partie:
Le Catalogue Gamma, Barclay & Columbia


Entre 1963 et 1968, Les Cailloux (Jean-Pierre Goulet, Robert Jourdain, Jean Fortier, Yves Lapierre) s'imposèrent comme l'ultime groupe folk Québécois, alliant leurs influences roots internationales aux rythmes du Kingston Trio et de la vague folk alors déferlante. Véritables embassadeurs culturels, ils ouvriront pour Pauline Julien comme pour Buffy Sainte-Marie, se produiront à l'Olympia en 1967 avant d'entreprendre une tournée des bases militaires canadiennes en Europe, Afrique & Asie. (Dictionnaire de la musique populaire au Québéc 1955-1992). Leur énergie et leur assurance sur scène leur assureront un contrat pour leur propre série à Radio-Canada (1966-1968). À leur dissolution en 1968, Yves Lapierre optera avec brio pour le métier d'arrangeur (Léveillée, Charlebois, Jean Lapointe) alors qu'un autre diamant brut émergeait des Cailloux. Après 38 ans de silence, il me semblait pertinent de rendre enfin hommage à la courte carrière du jeune musicien Jean Fortier, lui qui décédait prématurément en 1971, tout au plus quelques semaines après la publication de son unique album.




Spectacle à l'Olympia, 1967; Fortier est à l'extrême droite.
(Michèle Maillé; Blow Up des grands de la chanson au Québec; Ed. de l'Homme, 1969)

Les Cailloux étaient des artistes sur scène pour soutenir le RIN dirigé par le fougueux Pierre Bourgault lors de son spectacle bénifice de mars 1965. Aux côtés de Claude Gauthier, Renée Claude, Jean-Guy Moreau et plusieurs autres, ils témoignaient de la complicité croissante du renouveau politique aux activités artistiques en province. Fortier se démarquait déjà au sein de ses comparses rocailleux. On l'aperçut brièvement au sein du groupe fictif Les Tiqueclaques, interprétant divers succès des Beatles pour meubler quelques scènes du film de Jean Pierre Lefebvre, Patricia et Jean Baptiste (1966). Il pousserait l'audace en devenant le premier de son groupe à graver un simple en solo pour Capitol en 1967, Moneyville (20 Black) / Mariette (aussi publié sur Gamma, 1968). La candeur singulière de Fortier alimente un son folk riche, pop et juste assez risqué sous les habiles arrangements de Paul de Margerie. Moneyville sidère par son propos, aussi actuel à l'époque qu'aujourd'hui, où l'appât du gain et la spéculation anime la quête du bonheur de ses habitants. Fin cynique, Fortier s'imprègne de la fougue de Brel (qu'il avait croisé la même année sur le plateau de Jeunesse Oblige), affiche son profile le plus sombre et mise tout sur le 20 noir:

Pour gagner beaucoup d'argent, j'investi beaucoup d'argent, je spécule jour et nuit à Moneyville.
Je spécule tant et tant que je fais beaucoup d'argent; l'argent c'est les enfants de Moneyville.

Demain j'aurai ma maison, des bagnoles, du vison à offir aux femmes de Moneyville.

Demain j'aurai des valets qui ne parlerons qu'anglais; on ne parle qu'anglais à Moneyville.




Sa face B, Mariette, est plus naive et pop-la-vie!, dévoilant un aspect frivole du chansonnier qui se répètera sur son prochain simple. Celui-ci annonce l'arrivée de l'arrangeur Franck Dervieux, ce futur session man de Ferland (le clavieriste de Jaune, c'est lui), reconnu pour ses riches arrangements et son flair pour s'entourer de musiciens de talents. À ce sujet, son dramatique album Dimension M en compagnie de Contraction/Toubadou est chaudement recommandé. Pour deux oiseaux (1968; Barclay B60044) offre une mélodie plutôt banale qui pourtant séduit par son accompagnement de cithare; totalement dans l'air du temps, son timbre grinçant n'est pas sans rappeler celui entendu sur 50 000 000 d'hommes de Charlebois. Plus groovy, Petit-Jean-la-calamité bénéficie d'un accompagnement de cordes bien graves, de clavecin et d'une ronde ligne de basse. Encore ici, la trame narrative est pimentée à l'humour noir: Petit-Jean s'installe en ville et s'empresse de prévenir les gens de ses réactions décidément funestes lorsque défié. Calamité pas à moitié!

Mon nom n'vous dira rien, mais du plomb dans les dents, ça peut pas s'oublier
J'fais pas du barratin, c'est pas mon élément. J'aime mieux défoncer!

Cachez bien vos femmes et vos enfants! Et ne provoquez pas Petit-Jean, ça pourrait chauffer! [...]

Je veux mourir merveilleusement, baignant dans une marre de sang, baignant dans une marre de sang
, baignant dans une marre de sang...
C'est peu demandé pour Petit-Jean-la-calamité.




Toujours en compagnie de Dervieux, Fortier forge sa nouvelle tengeante musicale en enregistrant le premier simple autour duquel sera élaboré son unique album éponyme. À la recherche d'un public plus diversifié, le 45 On vend du vend / Au grand jour (Columbia C4-7093) sera aussi enregistré et publié en anglais sous le titre Sellin' Sunshine / On my mind (Columbia C4-2905) en 1969.


Télé Radio Monde, juin 1969.

Accompagné du Montréal Pop (musiciens indéterminés), le simple est cosigné d'un certain Laferrière. Serait-ce Yves Laferrière, le bassiste du groupe Contraction qui accompagnerait plus tard Dervieux sur son unique album? Peut-être.Tenez...tant qu'à spéculer des musiciens gravitant autour de Fortier, soulignons l'implication d'un jeune Serge Chapleau à la batterie sur certains de ces premiers simples (mais lesquels? Quelqu'un sait?).








On vend du vent
/ Sellin' Sunshine est une salve explosive de rock n' soul qui vous coupera littéralement le souffle! Au coeur de l'ouragan, Fortier démontre sa prédilection pour l'autoréférence et la proximité de ses sujets, renforçant l'image qu'on se fait de son groupe, décidément tissé serré. Un bassiste inépuisable, des cuivres tonitruants, un fuzz wha-wha dément: le chansonnier comprit rapidement que pour tourner le dos au son des Cailloux, ça prend du 220V ou ben donc, ça vaut rien! Il est conscient qu'il mitigera son public, mais ce n'est pas une raison pour ne pas le faire sans fracas.

Si ça rapporte pas, en tout cas ça swing en grand!
Mais comme disait Sinatra, «ça peut dev'nir un maudit bon placement!»

C'est beau quand la basse se met à groover, quand Buddy se met à tapocher.

C'est beau quand tes hanches font le ballant.

On est pas comme qui dirait une gang de méchants! On vend du vent!




La traduction est efficace, la finesse des ritournelles jouales résonne tout autant dans le jargon rock n' roll de Sellin' Sunshine. Le mix de cette version anglophone se distingue de celui de On vend du vent ; plus franc et moins aérien, il permet néanmoins d'apprécier encore plus les notes corrosives de la guitare fuzzée. En face B, Au grand jour devient On my mind. Sur cette ballade éthérée, Fortier exprime ses pulsions amoureuses sans pudeur et construit son interprétation sur un crescendo planant qui tire maladroitement, mais malgré tout, profit de la traduction.

It's no use anymore.

I quit keeping the score, once every sleepless night.

Now you fall just like rain on my mind, on my mind.

You turn me up, you bought your time on my mind...


En 1969, cinq ans après avoir fait la première partie du spectacle de Pauline Julien en compagnie des Cailloux, Fortier lui composait la chanson Exil avant de se concentrer enfin sur son ambitieux premier album pop, au carrefour d'influences soul et rock. Une histoire à suivre dans le prochain article...


First part of a serie reuniting all of Jean Fortier's scarce recordings. Former guitarist and singer with the popular folk band Les Cailloux, Fortier broke out of his rootsy shell in 1967 and embarked on a serie of great pop-rock 45 with some psych moves. Moneyville (20 Black) is a cynic tale with a economic theme that's still acurate: greed and speculators! Fortier delivers a dramatic performance (think Jacques Brel). Pour deux oiseaux (For two birds) features the work of well-known arranger Franck Dervieux (Dimension M) who adds a little bit of sitar here and there. It's B-side is rockier, with harpsichord and a nice bass line; it depicts the story of Petit-Jean, a ficitional known-murderer who doesn't like to be pushed around. Dark humor is Fortier's game and he plays fair. His last non-album 45 is the explosive Sellin' Sunshine, an english rendition of his own song, on vend du vend. Both these french and english 45 were released at the same time and were cowritten by "Laferrière". Could it be Yves Laferrière, future bassist for Contraction and Dervieux's own album (Dimension M; 1972)? Could be... Next stop, we take a look at Fortier's sole eponymous album from 1970.


Télécharger ces quatre simples / Download all four 45 :

Jean Fortier - Simples Gamma, Barclay & Columbia

mercredi, février 18, 2009









On parle de nous!


Dans le cadre de son émission du 17 février sur la Première Chaine de Radio-Canada, Christianne Charette recevait Robert Thérien (auteur du Dictionnaire de la musique populaire au Québec 1955-1992) et le journaliste Jean-Christophe Laurence afin de revenir sur un récent article de ce dernier dans La Presse. Les nombreuses réponses à l'article intitulé «Rééditez ces disques!» témoignent décidément de l'intérêt populaire à réentendre un jour les catalogues complets de Claude Léveillée, Ginette Reno, Les Cyniques, Les Jérolas et des artistes rock négligés tels Vos Voisins ou Aut'Chose. L'entrevue aborde les rétissences des majors de l'industrie qui depuis des années ne souhaitent pas s'investir dans ces projets trop peu lucratifs... à leur avis. En conclusion, Laurence ne manque pas de souligner le rôle des blogueurs qui comme Babette's Feast, Tête Carrée, Psyquébélique, Vente de Garage et votre humble serviteur, diffusent et revalorisent le catalogue Québécois de ces artistes...pas si oubliés que ça finalement. Chacun propose une discographie qui mérite votre visite!


Écoutez l'entrevue.

lundi, février 16, 2009


Claire Lepage - Le magazine de La Presse
(février 1967)

Voici le survol de la carrière naissante de la révélation pop de 1966 (selon Méritas) proposé par le Magazine du quotidien La Presse. Comme le disque de Claire Lepage & Compagnie semble être un favori des lecteurs de Patrimoine PQ, j'ai pensé que vous apprécieriez ces photos inédites depuis leur publication originale. D'autres périodiques numérisés suivront ultérieurement, au gré de mes découvertes! Si vous aviez d'autres documents d'archives pertinents ou des critiques originales des albums mentionnés sur ce blog et souhaitiez les partager, n'hésitez pas à m'en faire part.

Parlant de Claire Lepage & Compagnie, nous sommes toujours à la recherche de Richard Patry (batteur de la Compagnie, membre du groupe Le Match). N'hésitez pas à me recontacter à cette adresse M. Patry; plusieurs musiciens et amis voudraient rependre contact avec vous!










The singin' doll! As Claire Lepage seems to be a favorite amongst our readers, I tought I'd scan some rare photos
I discovered this week-end of this sweet rocker. In february 1967, La Presse (Montreal newspaper) ran a profile on her, a few months after she won a Meritas for her rendition of Bang-Bang. I'll try and post some more as soon as I discover some more period...periodicals.